Le parcours d’Éloïse

De la soudure au modelage , vers un nouveau départ

« Moi, je suis une manuelle »

Cette certitude a amené Éloïse à faire une formation de « soudeur ». À ce moment-là, son imagination lui faisait entrevoir la création d’objet de décoration en métal…. La dure réalité l’a rattrapé : à la fin de son instruction elle s’est retrouvée dans un milieu industriel à souder, à souder encore et à souder toujours, sans aucune possibilité de créer quoi que ce soit. Qui plus est, et malgré la rapide évolution des mœurs, le milieu industriel est toujours majoritairement masculin et ce n’est pas facile de trouver sa place en tant que professionnelle.

Découverte de à La Belle Affaire

D’un autre côté, la recyclerie de la Rochelle venait de voir le jour… . En y venant comme cliente, elle a senti naître en elle l’envie d’y travailler. Elle en a parlé autour d’elle et a été encouragée dans cette envie au point d’y faire acte de candidature spontanée. Elle a été reçue, mais la recyclerie ne pouvait l’employer qu’à travers un contrat aidé (voir encart). Après une petite déception et la perte de l’espoir d’avoir un CDI, elle s’est insérée dans le dispositif et a participé à différents chantiers et particulièrement celui du livre. À « La Belle Affaire » les gens déposent beaucoup de livres et si l’ensemble du personnel essaye d’en sauver un maximum il y en a encore beaucoup qui finissent au pilon. Éloïse a participé au tri de nombreux ouvrages en étant attirée par quelques-uns comme « Trois »*1 ou « Mamie Luger »*2 qu’elle a achetée pour pouvoir le lire à la maison.

L’ambiance de travail à la recyclerie lui a tout de suite plu. Elle le dit sans ambages : elle a été bien accueillie par l’équipe en place. Plus tard, lorsque son tour sera venu d’accueillir les nouveaux, elle sera attentive à les aider « à sortir de leur coquille », d’autant que de manière générale elle constate que le plus souvent, ce sont « de chouettes personnes » qui viennent travailler à la recyclerie. De son passage à la recyclerie, il lui restera des amis.

Une petite ombre au tableau de ses ressentis : le personnel travaille chacun à son rythme, sans tenir compte du rythme de son voisin… dommage. L’aide à l’embauche ne peut pas excéder deux ans. Pendant ce temps, Éloïse a peaufiné l’élaboration de son projet de vie et a fait plusieurs stages de mise en condition. Elle aurait aimé devenir encadrante à la recyclerie… une promotion pas impossible dans le principe, mais compliquée parce que l’équipe dirigeante ne souhaite pas mettre en porte-à-faux un employé qui passerai du jour au lendemain dans l’équipe dirigeante. Qui plus est, ESC 17 souhaite avoir des personnels formés et diplômés. Le stage de formation dure une quinzaine de semaines loin de son domicile… pas toujours facile ! Éloïse s’est donc tournée vers d’autres formations et stages, dont un dans une imprimerie. L’occasion pour elle de se rendre compte que ce type de travail ne lui convenait pas…. Mais, et c’est souvent, que l’on découvre ce que l’on aime en rejetant ce que l’on n’aime pas… C’est ainsi qu’Éloïse est revenu à ses premières amours…

Un Nouveau Départ en Kinésithérapie

Fraîche émoulue de l’école, elle a travaillé pendant quatorze ans dans un centre de Thalasso. Elle y était masseuse hypnothérapeute. L’évolution de la structure, après un changement de direction, s’est faite vers des massages à but esthétique. Un changement d’orientation qui est venu s’ajouter comme ça arrive souvent, à des difficultés dans sa vie de famille… On ne sait pas où est la goutte, mais le vase a débordé et déprimée, usée elle a perdu l’envie et a préféré se lancer dans la découverte de son aventure personnelle. C’est comme ça qu’elle est passé par l’industrie, en soudure, on l’a vu, pour joindre les deux bouts. Puis à la recyclerie où elle a pu travailler à son projet professionnel. De réflexions en formation l’eau a coulé sous les ponts et ses différentes recherches de travail dans de nouveaux secteurs ont fini par la convaincre que son premier métier, son premier choix de vie était finalement le bon. Elle en a parlé autour d’elle. Ses copines l’on encouragé dans ce sens. Les responsables de la recyclerie moins, ils ne trouvaient pas le projet abouti, et il n’est pas dans les principes de l’association de laisser s’envoler quelqu’un qui risque de ne pas réussir, surtout lorsqu’un potentiel semble être au rendez-vous.

Éloïse a travaillé son projet. Ses amies continuées de l’encourager et puis, une porte s’est ouverte et pas n’importe quelle porte : celle d’un cabinet « masseur-Kinésithérapeute ». Il y a des moments dans la vie où rien ne va et il y a des moments où tout s’articule pour que ça aille bien… c’est comme ça que le besoin du cabinet d’un côté, le savoir-faire d’Éloïse de l’autre et un espace disponible à l’intérieur du cabinet pour pratiquer ont permis d’envisager une collaboration. L’envie se transforme en projet qui va bientôt voir le jour : Éloïse attend juste d’être libérée de ses obligations professionnelles avec la recyclerie pour se lancer….

Il nous reste qu’à dire au revoir à Éloïse et à lui souhaiter bon vent. De son côté, elle confie que « finalement, elle n’est pas mécontente de partir ». Certes elle était entrée à la recyclerie dans l’espoir d’y rester, mais l’espoir de servir à des gens qui en ont besoin, l’espoir d’être sa propre patronne et surtout l’espoir de réussir par elle-même ont changé sa vision de l’avenir…Alors, si vous voyez ce logo dans la rue Marius Lacroix à la Rochelle et que vous avez envie ou besoin d’une petite pause massage, alors prenez rendez-vous…


*1 « Trois » de Valérie Perrin (Albin Michel 2021)

Une voiture est découverte au fond d’un lac dans le hameau où Adrien, Etienne et Nina se sont rencontrés en CM2. Devenus fusionnels, ils s’unissent par la promesse d’aller vivre à Paris et ne jamais se séparer. Virginie, couvre l’événement en tant que journaliste. Peu à peu, elle dévoile les liens extraordinaires qui unissent ces trois amis d’enfance. Que sont-ils devenus ? Quel rapport entre cette épave et leur histoire d’amitié ?
Au fil d’une intrigue poignante et implacable, Valérie Perrin nous plonge au cœur de l’adolescence, du temps qui passe et nous sépare….


*2 « Mamie Luger » de Benoît Philippon (Les Arènes 2018)

A l’heure où la parole se libère, où la violence faite aux femmes est enfin un vrai sujet, quel bonheur de le voir traité par une centenaire dynamique et cocasse, une féministe de la première heure, une preuve vivante d’un patriarcat ancestral et banalisé ! Six heures du matin, Berthe, cent deux ans, canarde l’escouade de flics qui a pris d’assaut sa chaumière auvergnate. Huit heures, l’inspecteur Ventura entame la garde à vue la plus ahurissante de sa carrière. La grand-mère au Luger passe aux aveux et le récit de sa vie est un feu d’artifice. Il y est question de meurtriers en cavale, de veuve noire et de nazi enterré dans sa cave.

Alors aveux, confession ou règlement de comptes ? Ventura ne sait pas à quel jeu de dupes joue la vieille édentée, mais il sent qu’il va falloir creuser. Et pas qu’un peu…

Ce livre a été adapté pour le théâtre par Josiane Carle – Carole Chevrier